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Loi du 28 décembre 2019 visant à agir contre les violences au sein de la famille

Le 11 mai 2020

La loi n° 2019-1480 du 28 déc. 2019 visant à agir contre les violences au sein de la famille a été définitivement adoptée le 11 décembre 2019.

La circulaire du 28 janvier 2020, prise en application de celle-ci, présente les dispositions de droit civil et de droit pénal immédiatement applicables ainsi que les instructions de politique pénale issues des travaux du Grenelle contre les violences conjugales.

Les points relatifs aux aspects civils du texte sont ici abordés : 

1. Une nouvelle ordonnance de protection

Les nouveautés apportées sont notables, tant du point de vue des conditions que de la procédure.

- Le demandeur n'a pas à démontrer l'existence d'une cohabitation, passée ou présente, ni l'existence d'une plainte pénale préalable. L'appréciation de la demande est clairement recentrée sur le faisceau d'indices permettant de caractériser la vraisemblance des violences et du danger allégués.

 - Le juge dispose d'un délai maximal de six jours pour rendre sa décision. 

-  En l'état, la convocation des parties par lettre recommandée avec avis de réception devient incompatible avec ce délai de six jours. Un décret en Conseil d'État définira un nouveau cadre. Dans l'attente, si le juge aux affaires familiales est saisi par voie de requête, il autorisera le demandeur à signifier la requête et les pièces en vue d'une date d'audience donnée, dans un temps suffisant pour préserver le principe du contradictoire. Lorsqu'il sera saisi par voie d'assignation, le demandeur devra former sa demande à une date d'audience communiquée par tous moyens, vraisemblablement au visa de l'art. 1137, al. 2, Cpc et intitulé : « assignation à bref délai ». En cas de danger grave et imminent, le juge aux affaires familiales peut décider de convoquer les parties par la voie administrative, c'est-à-dire par des représentants des services de gendarmerie ou de police.

- Le parquet devient "la troisième partie" de cette procédure. Désormais, il sera convoqué par le juge, pour l'audience, à fin d'avis. Il intervient en qualité soit de partie demanderesse à cette procédure, soit de partie jointe.

- De nouvelles mesures et obligations pour le juge aux affaires familiales  : l'article 515-11, 1° bis, prévoit une interdiction nouvelle pour le défendeur, à savoir se rendre dans certains lieux dans lesquels se trouve de façon habituelle la partie demanderesse. La prise en charge globale du défendeur peut par ailleurs être proposée. Les mesures envisagées prioritairement sont : l'attribution du logement au demandeur et un droit de visite au sein d'un espace médiatisé. Le juge aux affaires familiales se voit « obligé » d'informer le procureur de la République ou de motiver spécialement sa décision lorsqu'il entend déroger à ces points particuliers.

2. Une nouvelle dimension donnée à l'exercice de l'autorité parentale

Des mesures existantes sont modifiées, d'autres, nouvelles, sont introduites. L'idée qui préside est la préservation de l'intérêt supérieur de l'enfant dans un contexte marqué a minima par des poursuites pénales d'un des deux parents pour des faits délictuels ou criminels sur l'autre parent ou sur l'enfant .

- prérogatives « familiales » du juge pénal : soit l'exercice de l'autorité parentale est d'office retiré en cas de condamnation du parent violent, soit il est provisoirement suspendu de plein droit. Dans le premier cas, sont concernées des infractions spécifiques tels les crimes d'atteintes volontaires à la vie (assassinat, meurtre, empoisonnement...), les crimes et délits d'atteinte volontaires à l'intégrité de la personne (tortures, actes de barbarie...), les crimes et délits de nature sexuelle (viol, agression sexuelle...). Le juge pénal doit alors statuer sur le retrait de l'exercice de l'autorité parentale. Certaines infractions plus rares, telle la séquestration criminelle, n'entraînent pour le juge pénal qu'une simple faculté d'avoir à se prononcer sur cette modalité. À défaut, l'exercice de l'autorité parentale sera suspendu de plein droit à titre provisoire pendant six mois dans l'attente de la décision du juge aux affaires familiales .

- préservation de l'exercice de l'autorité parentale : l'objectif est la protection des victimes et la préservation de l'intérêt supérieur de l'enfant. Désormais, l'exercice de l'autorité parentale et les droits de visite et d'hébergement du parent poursuivi ou condamné, même non définitivement, pour un crime commis sur la personne de l'autre parent sont suspendus de plein droit jusqu'à la décision du juge et pour une durée maximale de six mois, à charge pour le procureur de la République de saisir le juge aux affaires familiales dans un délai de huit jours .

Ainsi, dès la mise en oeuvre des poursuites (caractérisée par exemple par un réquisitoire introductif contre personne dénommée), dans un souci de protection de l'enfant, les droits du parent violent sont suspendus. Cette suspension ne vaut que dans l'attente d'une décision au fond rendue par le juge aux affaires familiales. Il est alors saisi soit par le procureur de la République, soit par la juridiction pénale lors de la condamnation. Cela résulte d'un double mécanisme de suspension : dès l'engagement des poursuites, puis lors de la condamnation. Du côté du parent poursuivi ou condamné, se voyant opposer cette suspension, il lui sera possible de saisir le juge aux affaires familiales pour qu'il statue sur l'exercice de l'autorité parentale et sur son droit de visite et d'hébergement. En cas de décès de l'autre parent, l'exercice de l'autorité parentale pourra être délégué à une tierce personne .

- entrée en vigueur : ces dispositions sont applicables immédiatement aux poursuites engagées ou aux condamnations prononcées après l'entrée en vigueur de la loi, soit à compter du 30 décembre 2019. Pour des poursuites ou condamnations antérieures, elles sont sans effet de plein droit sur l'exercice de l'autorité parentale.

3. Un téléphone grave danger

Un téléphone grave danger sera attribué plus simplement et plus largement. La victime peut désormais le solliciter par tout moyen auprès du procureur de la République, lequel procédera à une évaluation globale de la situation afin de mieux orienter la victime.

Par ailleurs, l'attribution pourra se faire dès qu'une interdiction d'entrer en contact avec la victime aura été prononcée ou en cas de danger avéré et imminent parce que l'auteur serait en fuite ou non interpellé ou que l'interdiction d'entrer en contact avec la victime n'aurait pas été prononcée.